mercredi 22 février 2012

Le Sphynx Barbosa

Salut à tous,

Cédric Barbosa, donc. Un cas qui défie toute analyse, toutes prévisions, voire toute logique. Des bataillons de spécialistes se penchent quotidiennement sur cet étrange miroir de la vie qu'est le foot, mais je n'en ai encore vu aucun prédire à un ancien joueur professionnel, tombé au troisième niveau national à 33 ans, qu'il sera capable de réussir sa meilleur saison au sein de l'élite deux saisons plus tard. C'est ce qui se passe avec le natif d'Aubenas, actuellement dans la forme de sa vie avec le promu Evian-T-G.

Il faut dire que la fin de sa trajectoire footballistique épouse forcément le destin assez atypique du club savoyard, créé de toutes pièces en 2008 par le PDG de Danone, Franck Riboud, en fusionnant les désormais défunts Olympique Thonon Chablais et surtout Croix-de-Savoie, qui était lui-même issue d'une fusion avec le FC Gaillard, et qui n'avait joué plus haut que le troisième échelon. Il évoluait en CFA quand Danone en a pris les rênes et, en quatre saisons, est monté en Ligue 1, une performance supérieure à celles de Valenciennes ou Boulogne, par exemple, ces derniers ayant mis plus de temps pour monter en National.

Barbosa est arrivé en 2009 à Evian, alors en National, après que son contrat avec Metz n'ait pas été reconduit. Forcément, pour tout le monde, ce n'était pas pour relancer une carrière qui n'avait jamais connu les sommets, malgré 216 matches parmi l'élite, pour 16 buts, avec un record de quatre buts atteint à deux reprises, avec Montpellier en 2002/2003 et Metz en 2007/2008, ainsi que 90 matches en Ligue 2 (5 buts) et 17 matches européens (6 d'Intertoto, 11 de C3), dont deux matches (perdus) contre la Corogne avec Montpellier, en 1999 (3-1, 0-2). Le bon joueur de club classique, qui ne fait pas de vagues, formé à Alès (1994/1997) puis logiquement passé par le club voisin de Loulou Nicollin (1997/1998), avec qui il remporte l’inénarrable Coupe Intertoto en 1999, et où il côtoya des joueurs comme Baills, Alicarte, Fugier, Laurey, Rouvière, Dzodic, Franck Silvestre, Maoulida, Vercoutre, Laurent Robert, Carotti, Bakayoko, Mansaré, Bamogo, Delaye, son actuel coéquipier Sorlin, et même Loko, Ouédec et Gravelaine. D'abord milieu offensif, il baisse vite d'un cran pour évoluer durant longtemps au poste de milieu défensif, qu'il ne quittera que récemment.

En 2003 il file à Rennes pour trois saisons, dont les deux dernières où il jouera peu (25 matches toutes compétitions confondues, contre 37 la première année). En Bretagne, il évolue avec des joueurs comme Diatta, Arribagé, Ouaddou, Didot, Jeunechamp, Kallström, Monterrubio, Freï, Jacques Faty, Maoulida à nouveau, Utaka, Edman et de jeunes débutants, Yoann Gourcuff et Stéphane M'Bia. Il part ensuite pour se relancer à Troyes, où il ne jouera qu'une saison (2006/2007) avec notamment le jeune Matuidi, Lachuer, Nivet, Danic ou Gigliotti, avant d'arriver à Metz en 2007 pour deux saisons, dont une à l'étage inférieur, avec à ses côtés Bassong, Cubilier, Gygax, le jeune Pjanic, Papiss Cissé et son actuel collègue Guillaume Rippert. La suite, on la connaît.

Tentons d'expliquer à présent cette résurgence, qui fait un peu penser à celle de Sébastien Piocelle par exemple, officiellement perdu pour le football lorsque l'ancienne pépite de la Jonelière se retrouva an troisième division italienne il y a cinq ans, avant de revenir en Ligue 1 avec Arles-Avignon l'année dernière. Sauf que son retour s'était nettement moins bien passé (19 matches)... il termine aujourd'hui sa carrière à Nîmes, candidat à la remontée en Ligue 2 cette saison. Il a deux ans de moins que Barbosa...

D'abord, il faut voir l'importance de Barbosa au sein du promu. Casoni puis Correa l'utilisent au poste de ses débuts, milieu offensif gauche, où sa patte gauche fait probablement plus merveille que sa vitesse, qui reste cependant très acceptable pour son âge "avancé" (35 ans). D'autres joueurs de sa génération, voire plus vieux, comme Laurent Batlles (36 ans), buteur à 3 reprises pour autant de passes décisives en 23 matches (7 titularisations) réalisent également des miracles au sein de l'élite. Mais le Stéphanois n'est pas vraiment un titulaire indiscutable, contrairement à Barbosa (14 titularisations sur 17), que personne ne parvient à concurrencer dans son couloir, même si Khelifa ou le jeune M'Madi peuvent le relayer de temps en temps. Mais le promu a fait venir Kahlenberg cet hiver, sans que le Danois ne soit encore parvenu à s'imposer dans le onze savoyard...

Auteur de sept buts et cinq passes décisives, c'est le meilleur buteur et le joueur le plus décisif d'Evian, avec Sagbo, qui compte les mêmes stats mais qui évolue, lui, en pointe, et qui lui rend 12 années et presque 10 matches de plus en temps de jeu ! Les deux joueurs sont septièmes, si on additionne les buts et les passes, à égalité avec des joueurs comme Oliech, mais surtout Bastos, Ménez ou Gameiro. Son temps de jeu n'est cependant pas le même que ses collègues puisqu'il n'est plus forcément capable de disputer tous les matches en intégralité, et en efficacité par minutes il est extrêmement bien classé, à la fois pour un milieu, certes offensif, mais surtout de 35 ans, puisque parmi les 63 joueurs qui ont déjà disputé au moins 1000 minutes, seuls Giroud (1 but toutes les 127 minutes), Kembo (148) et Jovial (151) font mieux que son score (152) ! Il devance ainsi des joueurs tels que Lisandro Lopez (157), Gomis (181), Nene (183), Rémy (190) ou Gameiro (191)... soit ce qu'on fait de mieux en terme d'attaquants aujourd'hui en Ligue 1, voire en équipe de France !

Bref, le promu ne peut se féliciter d'avoir convaincu Barbosa - et de le prolonger ce jour même d'une saison ! - de venir jouer dans ses rangs au troisième échelon, qu'il n'avait plus connu personnellement depuis ses années Alésiennes. De fait, les louanges sont aussi à tresser pour ce club qui ne roule pas sur l'or, mais qui ne circule quand même pas dans la même catégorie que les autres promus, ne serait-ce que médiatiquement, grâce à Danone mais aussi ses prestigieux parrains, Zidane et Lizarazu. Pourtant, comparé aux internationaux Andersen, Govou, Wass, Mensah, Poulsen, Kahlenberg, Khelifa, sans parler d'Olivier Sorlin ou Jérôme Leroy, Barbosa n'était pas vraiment parti pour faire la une des journaux. Ce n'est toujours pas le cas malgré des performances de premier plan, mais il ne s'en est jamais vraiment mal porté jusque là...

A plus tard !

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